Tout est prêt. Je m'installe au bureau, mon chat est sur mes genoux. J'inspire, je pose mes doigts sur la feuille, et Je ne sais pas ce qui va sortir.
Qui est ce Je assis prêt à se lancer dans l'écriture ?
Ah, écrire.
Laissez-moi vous parler de ce que je vis quand j'écris.

D'abord, seule, j'écrivais surtout dans mes carnets "de présence" : les chemins de ma conscience, mes préoccupations, mes frustrations, depuis toute petite j'ai trouvé un allié neutre, un terrain à explorer dans la page blanche.
Ensuite, écrire est devenu utile. Écrire des fiches pour apprendre, pour se remplir, pour mémoriser, pour se rassurer, pour fixer des notions, pour se souvenir, pour performer à l'examen.
Puis écrire pour produire, pour concevoir, élaborer, créer des supports intelligibles, soutenant, qui allaient accompagner au mieux l'autre sur son chemin d'apprentissage.
Et quelque part ensuite, écrire est devenu mécanique, rigide, dépourvu de sens et de sève. Ou bien était-ce moi ? Est arrivé un moment où écrire était ridicule, sans saveur, et même dégoutant, inutile, absurde. Des mois et des mois sans écrire, à se lever pour se doucher et revenir au néant de la nuit de l'âme. Quelques mois plus tard, une phrase est revenue se poser, au hasard d'une conversation, d'un échange, comme un tout petit pas. Mais c'était encore pour copier l'existant, relever le réel, témoigner de l'érudit par peur que sa parole ne s'enfuit.
Jusqu'au jour où. Écrit. Thérapie.
Un groupe se réunit le soir autour d'un guide à l'aura bienveillante et discrète, nous invitant à nous laisser libre d'écrire. Nous autoriser à, oser balader le stylo : pas pour recopier ce qui a été, pas pour faire une fiche, pas pour rendre compte, pas pour produire, pas pour élaborer, pas pour être utile. Juste pour le plaisir. Pour le plaisir d'écrire.
Mais écrire sur quoi ? Commence la part rationnelle à paniquer. On lui donne alors deux mots, comme deux opposés, et on l'invite à observer ce qui émerge de cette apparente contradiction. Rêve et réalité. Fini et infini. Passé et présent. Et de ces deux brins jaillisse quelque chose d'inattendu, soutenu par le groupe bienveillant se prêtant individuellement à la même pratique : celle de gambader sans dictée avec pour seule guide une pointe fine sur un support vierge, et une invitation à explorer un champ, un champ des possibles, où deux adversaires viennent se rencontrer et laisser émerger une étincelle de créativité.
Écrire. C'était donc cela écrire !
Écrire pour rêver, pour inventer, pour créer, pour se laisser surprendre, pour s'amuser, pour déclamer, pour inspirer, pour renaître, pour vivre le grand saut dans le vide, le cœur qui bat de ne pas savoir ce qui va jaillir, la peur et la crainte à l'idée de se lire devant tous, et chaque mois l'exercice devient plus beau, plus réparateur. Dans cet écrin de vie, dans de cocon d'écrit, je peux renaître, je suis invitée à vivre à nouveau, sous un regard qui couve, sous des oreilles qui m'écoutent, sous des mains qui m'applaudissent.
Et je peux vous le dire, écrire, c'est guérir.
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